Les penseurs de la TN
La thérapie narrative est née en Australie, fondée par Michaël White et David Epston.
Elle est issue de travailleurs sociaux et non de psychologues et de cliniciens.
Elle s’est nourrie d’influences de la sociologie, de la philosophie, de questions débattues par les penseurs de la « French Theory »
Ces origines « atypiques » fondent et colorent une approche qui ne l’est pas moins.
Les principes clés de la TN
On peut identifier un certains nombres de postulats, de principes fondateurs et de techniques particulières à la thérapie narrative, tant dans la façon d’être et de faire du thérapeute, que dans le proposition de conversations qu’il fera à son patient, pour nourrir leur collaboration.
Lire la suiteLe processus thérapeutique
Chaque patient est unique car chaque histoire l’est aussi.
Les conversations thérapeutiques passent toutefois souvent à travers d’étapes clés de processus, qui ne sont pas des passages obligés – car la pratique narrative n’est pas dogmatique- mais des repères de navigation.
Les fondateurs

Michael WHITE
Né le 29 décembre 1948 à Adélaïde et décédé le 4 avril 2008 à San Diego, il a démarré sa carrière professionnelle comme travailleur social auprès des communautés aborigènes qu’il allait rencontrer en pilotant des avions. Marqué par ses innombrables voyages, il a développé une fascination sans cesse renouvelée pour les cartes qu’il va utiliser comme métaphore dans son travail avec les patients. C’est l’ouvrage « Narrative means to therapeutic ends », co-écrit avec David Epson, qui signera sa renommée mondiale.
Pour Michael White, le patient est considéré comme un expert de ses problèmes, problèmes qui eux sont perçus comme construits par la réalité sociale et culturelle à laquelle appartient le patient. L’objectif de son approche est de s’inscrire dans une conversation thérapeutique avec le patient afin de l’aider à redevenir auteur de son histoire

David
EPSTON
Né en 1944 à Peterborough dans l’Ontario au Canada, il a étudié et a été diplômé en sociologie et anthropologie au sein de l’université d’Auckland en 1969 puis obtiendra en 1971 un certificat de travailleur social. Fin des années 1970, David Epson a participé, avec Michael White, à développer la thérapie familiale en Nouvelle Zélande et en Australie et a codirigé le Centre de thérapie familiale d’Auckland en 1987. D. Epson et M. White ont continué à travailler ensemble jusquà la publication en 1990 de ce deviendra le titre majeur des Thérapies Narratives.
David Epson a interviewé, dans le monde entier, des Femmes souffrant de troubles alimentaires, il a découvert que les descriptions du problème par des femmes pourtant de cultures différentes demeuraient identiques. Ses travaux ont été récompensés en 1996 par la Graduate School of Professional Psychology, JohnF.Kennedy University, en Californie
Au commencement, l’accompagnement social
du peuple premier d’Australie
Comprendre la génèse de la thérapie narrative, c’est non seulement comprendre l’anthrologie de son auteur,
mais aussi l’utilité première de ce qui allait devenir la TN
La « French theory »
La grande originalité de cette démarche est de trouver ses assises philosophiques et intellectuelles dans la lecture qu’a eu Michaël WHITE d’un ensemble de penseurs français marginalisés par la pensée dominante « lacannienne » et qui se sont fait connaitre et reconnaitre hors de nos frontières. On peut en citer ici quelques uns, ainsi que les influences qu’ils ont eu sur la TN

Michel
Foucault
Foucault considère toute forme de discours comme l’expression d’un pouvoir, de la part de celui qui le prononce, sur les autres. Ainsi, selon Michel Foucault, nous sommes soumis aux positions d’autorités qui déterminent, au travers de vérités normatives, nos vies, la manière dont nous devons les façonner et constituer.
M. White, s’est inspiré de la pensée de Foucault dans l’élaboration de ce qui deviendra les Thérapies Narratives. Il propose d’utiliser le processus d’Externalisation du problème pour développer un point de vue réflexif chez le patient et ce en l’accompagnant vers une identification de ce qui dans son récit serait le témoignage des discours de vérités qui l’assujettissent. Le patient par le biais de ce processus, et ainsi libéré du prisme de ces savoirs unitaire, est invité à repérer dans son histoire les moments d’exception où le problème n’est pas, où il a su s’opposer, s’insurger.

Gilles
Deleuze
Deleuze, en philosophe, s’est intéressé aux notions de possibilité, de différence, de multiplicité et de devenir. Il a considéré qu’aborder le concept d’identité dans un référentiel structuraliste suppose un étiquetage, une catégorisation qui par voie de conséquence conduit à une limitation du champ des possibles concernant ce que nous pouvons devenir.
Il décrit la vie comme des « nuages de points de différence » pouvant s’actualiser en de nouveaux devenirs. Deleuze, utilise le terme de « déterritorialisation » pour désigner une échappatoire afin d’aller vers d’autres espaces que nous offre d’autres possibilités.
M. White (2008) a suggéré que ces nuages de points de différence pouvaient nous offrir la possibilité de nouvelles histoires. Ainsi, à la lumière de G. Deleuze, dans la pratique narrative, il sera question de se concentrer sur les différences entre les particularités qui construisent une histoire et d’y découvrir des possibilités de devenir, des histoires alternatives.
Deleuze a décrit ses idées concernant l’identité, la différence et la possibilité « comme une cartographie du devenir » et a fait appel à de nombreuses métaphores spatiales ou géographique pour illustrer son propos.
Dans la pratique narrative, l’exploration thérapeutique est guidée par une série de cartes qui nous permettent un voyage d’avant en arrière dans le temps et vers des ouvertures multiples de nouveaux territoires et de nouvelles significations identitaires.

Jacques
Derrida
Directeur des hautes études en sciences sociales, il a créé l’école de pensée autour du déconstructionnisme et ainsi développé une nouvelle manière de réfléchir les sciences humaines.
L’approche narrative s’articule autour de ce concept, en ce qu’elle propose une déconstruction de l’histoire dominante saturée par le problème. Considéré comme identitaire, ce problème est déconstruit par le biais de conversation dite externalisante et est mis en contexte afin d’aller dans le sens d’histoire alternative dégagée de tout prisme social et culturel.
Les travaux de Derrida ont également mis en évidence que chaque terme d’une description, d’un discours est composé de lui-même et de son opposé. Les récits que produisent les patients sont, dans cette perspective, composés en toile de fond d’un absent, mais implicite ». Le thérapeute narratif est à l’écoute de l’expérience décrite et exprimée : l’histoire du problème ; et de ce qui ne se dit pas, mais qui est : l’absent, mais implicite.

Paul Ricoeur
C’est dans les conclusions de la trilogie de Temps et Récit que le concept d’identité narrative commence à se dessiner chez Ricoeur. En psychothérapie, l’identité humaine se reconstitue, se renégocie à travers la narration et le travail de narration.
Pour le philosophe, seule la narration permet de rendre compte de la dimension historique de la subjectivité. Paul Ricoeur a, en effet, travaillé sur l’idée de subjectivité considérant que si, la médiation de l’action et le langage jouent un rôle fondamental dans la formation du soi, ni l’un ni l’autre ne permettent de rendre compte d’une forme de temporalité. Cette temporalité pourtant, permet de situer le sujet dans sa propre histoire et faire de lui un sujet historique. Ainsi, la narration devient, à la manière du rêve, la voie royale pour rendre compte des enchaînements de faits qui constitue l’histoire d’une vie.
Le modèle ricoeurien a offert des éléments de grands intérêts pour les thérapies narratives. Chez Ricoeur se profile l’idée d’ « Homme capable » ; un sujet d’action ni pris en otage ni condamné par son passé mais en devenir, capable de comprendre différemment son propre vécu, de s’émanciper, en prenant la responsabilité de son histoire de vie. Enfin, Paul Ricoeur nous éclaire quant au statut de la souffrance, il soutient qu’elle ne doit pas être séparée de la parole mais transformée, interprétée, dissoute à travers les moyens de la narration et vers de nouvelles perspectives.

Pierre Bourdieu
L’entretien avec Fidier Eribon et Pierre Bourdieu (2-8 novembre 1984) paru dans le Nouvel Observateur (n°1043,p.87) et intitulé « Université : les rois sont nus », permet de souligner ce qui sera repris dans la conceptualisation de la thérapie narrative, comme le pouvoir des mots, le discours dominant et d’autorité, le monde social comme donné-construit, la question de l’objectivité (l’objectiveur objectivé), parler plutôt que d’être parlé (redevenir auteur/acteur de son histoire).

Principes fondateurs
Le thérapeute narratif s’appuie sur un certain nombre de postulats dont le fait qu’Il n’y a pas de vérité absolue et factuelle, mais le recit que se fait le patient des événements tels qu’il les perçoient, les ressent et les interprète.
Le thérapeute accepte d’être agent de déconstruction et permet, par ses questions et sa présence, la ré-élaboration/ reformulation de son histoire par le patient lui-même.
Une narration de soi mise à jour, ré-éclairée qui a pour finalité de dissoudre la présence du problème dans une nouvelle version où le il est moins présent, moins signifiant.
Une posture non-conventionnelle
Le thérapeute narratif est fortement engagé dans les conversations thérapeutiques qu’il anime ; Il n’y a ici pas de biais soignant/soigné, aidant/aidé.
Le thérapeute prend le risque de sa parole (la déclosion) et est acteur de la thérapie, au moins autant que le patient.
Ce dernier, « le narr’acteur », est central dans le récit et le processus. Le thérapeute, lui, influence et éclaire par le questionnement qu’il propose et par ses propres réactions ou commentaires, dans une posture de non-sachant investigant tel un enqueteur d’une curiosité sincère.


L’externalisation
En thérapie narrative, le patient n’est pas un problème (le dépossédant de son identité), le patient n’a pas un problème (« cela m’appartient, c’est en moi »), le patient est confronté à un problème.
C’est en partant de ce principe que le thérapeute va aider le patient à « externaliser » afin de permettre d’investiguer le rapport du patient à celui-ci. C’est précisemment l’étude de ce rapport au problème qui va faire l’objet de la thérapie, au travers des conversations thérapeutiques à venir.
Paysages et cartes
Au fil des conversations thérapeutiques, le binôme patient – thérapeute investigue l’ensemble des paysages intimes du patient : le paysage relationnel, le paysage des intentions et des valeurs, etc…
Le voyage dialogué au travers de ces paysages permet d’appréhender l’origine des facteurs de souffrance. Il fait émerger des moments d’exception à ces moments problématiques. Cela induit d’autres moments possibles qui, mis en liens, permettent une histoire alternative.
Mickael White, filant la métaphore des voyages, a développé un ensemble de cartes qui sont autant de sources et de thèmes de questionnement pour le thérapeute qui accompagne ainsi son client dans cette visite guidée ou plutôt orientée.

Le processus thérapeutique
Une intervention brève avec le patient au centre
La thérapie narrative est une démarche plutôt courte, menée en intelligence de situation par le thérapeute, mais fondée sur un certain nombre de phases clés
1 – LA DEMANDE
L’emprise de l’histoire dominante saturée- qui amène les patients à venir consulter un thérapeute narratif- est telle qu’il convient pour le binôme patient – thérapeute d’éclaircir la demande initiale portée par le patient. Il s’agit ici de faire tomber le masque de la demande alibi qui cache la demande réelle et d’appréhender – ensemble – les phénomènes de résistance à l’œuvre.
3 – L’EXTERNALISATION
Un moment essentiel du processus de thérapie narrative est d’externaliser puis de nommer le problème on en fait d’une entité à part, spécifique et distincte du patient.
C’est un moment particulier emprunt de créativité, d’originalité et parfois même de poésie.
2- CREER UN BINOME
La thérapie narrative se fonde sur une alliance forte et authentique entre le patient et le thérapeute qui constituent un binôme de recherche et d’investigation fonctionnant en parité, sans enjeu de pouvoir ni de savoir.
4- DES CONVERSATIONS THERAPEUTIQUES
Les conversations thérapeutiques qui s’ensuivent permettent de visiter les différents aspects de la relation que le patient entretient avec le problème pour faire emerger progressivement des traces alternatives qu’il s’agira progressivement de renforcer et d’étayer.
Contactez-nous
N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez en savoir plus.
Nous vous répondrons dans les meilleurs délais